Articles

« L’effacement » de Karim Moussaoui : Se noyer dans sa propre existence
REVIEWS & CRITIQUES12 / 16 / 2024

« L’effacement » de Karim Moussaoui : Se noyer dans sa propre existence

« L’effacement » ou « The Vanishing » de Karim Moussaoui crie l’aliénation jusqu’au bout. La 2e fiction du jeune réalisateur algérien est retenue pour les Journées cinématographiques de Carthage dans sa 35e édition. Récit d’une perte de soi.


leffacement-Karim-Moussaoui.jpg

Le synopsis en dit long sur ce que va voir le public. Ce même public qui ne tardera pas à faire la connaissance du personnage principal du film, Réda, avant sa disparition progressive. Réda vit chez ses parents dans un quartier bourgeois d’Alger, et occupe un poste dans la plus grande entreprise d’hydrocarbures du pays que dirige son père, Youcef, un homme charismatique et autoritaire. Mais sous ce vernis de réussite apparent, Réda dissimule un mal-être profond : il vit dans l’ombre de son père et ne sait pas lui dire non. Son frère Fayçal mène, au contraire, une rébellion ouverte contre Youcef, et finit par quitter définitivement le domicile familial, laissant Réda face à sa solitude et sa frustration. Un jour, le père meurt et un événement inattendu se produit : le reflet de Réda disparaît du miroir… Commence alors une chute dans les abysses de la folie.


Le jeune homme, interprété par Sammy Lechea, est criant de détresse. Il exprime des maux, les siens, et voit les failles de sa famille, d’un pays, d’une culture apparaître. Réda se laisse abîmer dans des machinations au quotidien qui prennent le dessus et le happent. Ses émotions s’accentuent, sa colère gronde, ses amours se dissipent et se dispersent, et son existence prend, de jour en jour, des tournures inattendues. Sa relation avec son frère ainé Fayçal prend fin, et celle avec son père se disloque jusqu’à la perte brutale de cette figure paternelle écrasante. Dans «L’effacement», le récit se vide assez rapidement de ses personnages. Ils apparaissent et se perdent, laissant le personnage central seul face à sa solitude.


Même en rencontrant l’amour, auprès de Malika, gérante d’un restaurant, il ne peut la garder, elle-même aux prises à des désarrois et à une histoire d’amour inachevée. Réda sombre dans l’incompréhension et dans la déception la plus totale, à force de subir une succession d’événements autour de lui. Un sentiment inassouvi plane, en dépit des privilèges qu’il possède et de sa place dans la société. Issu d’un milieu riche, Réda se laisse pourtant briser. L’histoire tient : truffée de suspense jusqu’au bout, le spectateur ne peut rester indifférent au sort qui sera finalement réservé à l’effacement de Réda. Le film est adapté d’un roman de Samir Toumi par Moussaoui et Maud Ameline. Sa première mondiale a eu lieu au festival de Marrakech.

« L’effacement » de Karim Moussaoui : Se noyer dans sa propre existence
« Arzé » de Mira Shaib : Une quête insolite
REVIEWS & CRITIQUES12 / 15 / 2024

« Arzé » de Mira Shaib : Une quête insolite

Comme une ode à la vie et à la multiethnicité, « Arzé » est l’itinérance effrénée d’une mère célibataire partie à la recherche d’un bien matériel crucial pour sa survie et de sa famille: un scooter. L’actrice Diamand Bou Abboud, dans le rôle-titre, livre une performance remarquable dans une comédie dramatique qui raconte une société fragmentée et un pays en délitement : le Liban.


Silhouette féminine frêle, allure élancée, mais l’apparence éreintée, la jeune femme peine à joindre les bouts, au quotidien. Sa relation houleuse avec sa sœur Leyla, agoraphobe, et celle qu’elle mène avec son fils de 18 ans, Kinan, rythment sa vie au fil des jours, dans un Beyrouth fragile, démuni, post-apocalyptique.


Kinan, aux prises aux amours adolescents et à la recherche d’aspirations simples, tient à soutenir sa mère face à la dureté du quotidien. L’adolescent a grandi sans figure paternelle. Il voit en « Arzé » la matriarche battante et le pilier de la famille. Il entamera d’ailleurs la recherche de son scooter volé, côte à côte avec elle. Trouver ce véhicule s’avère vital pour subvenir aux besoins vitaux de cette famille.


Ayant mis toutes leurs dépenses dans cet achat, cette trouvaille doit se faire, quitte à fouiller de fond en comble Beyrouth. Dans une quête interminable, la capitale libanaise semblera tantôt hostile, tantôt accueillante, insolite la plupart du temps, et où l’inattendu devient la norme.


Différents profils, souvent d’hommes, restent révélateurs d’une société profondément patriarcale. L’itinéraire s’avérera ponctué d’hommes, d’anecdotes et de mésaventures qui donnent à la maman « Arzé » courage, résilience, résistance et une volonté de contourner les difficultés du quotidien et de prendre conscience de ce qui se passe dans les méandres de son pays.


Infrastructure chaotique, anarchie, violence, pauvreté, clandestinité renforcent l’aspect absurde de cette déambulation urbaine peu ordinaire. « Arzé » brosse la situation difficile et le blocage que vit le Liban, un petit pays qui devient difficile à habiter, que son peuple quitte, qui coule et n’avance pas. La souffrance de ces citoyens les pousse à garder espoir jusqu’au bout, ou à partir avant qu’il ne soit trop tard. Le film a été tourné avant l’offensive récente d’Israël.


Le Liban a vu sa situation se délabrer déjà davantage depuis l’époque de la double explosion au port de Beyrouth, et qui a fragilisé une situation économique déjà au point mort.


Dans un chaos généralisé sans nom, Beyrouth brille par la richesse incommensurable de sa culture, son histoire et la beauté de son peuple si distingué.

« Arzé » de Mira Shaib : Une quête insolite
Exposition «Le visible et l’invisible» de Wadi Mhiri : Des correspondances en valises
REVIEWS & CRITIQUES12 / 7 / 2024

Exposition «Le visible et l’invisible» de Wadi Mhiri : Des correspondances en valises

Une exposition singulière faite de correspondances s’est érigée à l’Institut français de Tunisie. Dans une vaste salle d’exposition, les noms de nombreux pays se laissent lire sur les murs. Des destinations qui ont comme point commun notre mer méditerranéenne. L’intrigue se corse à la vue des valises remplies de dessins, croquis et créations diverses faites de matières variées. Des valises qui font office d’échanges.


Les correspondants ne sont autres que des collégiens/lycéens issus de 26 écoles situées dans les pays de la région Mena. L’exposition «Le visible et l’invisible», installée minutieusement par le scénographie et artiste Wadi Mhiri,se présente comme étant épistolaire, ayant un format autre que des lettres classiques rédigées. En effet,elle est faite d’échanges de réflexions et d’oeuvres créées et mises dans des valises, reçues en Tunisie de l’étranger. Des valises bien achalandées qui parviennent exactement de 13 établissements grecs, turcs, italiens, libanais, espagnols, égyptiens et d’Arabie saoudite. Les lycéens et collégiens de ce pays ont échangé avec d’autres jeunes correspondants tunisiens issus de 13 établissements répartis dans tout le territoire tunisien, faisant ainsi profiter tous les jeunes participants à cette aventure d’un savoir immense.


le-visible-1.jpg

Des textes, des dessins, des cartes, de réalisations plastiques et d’objets en audios et en vidéos ont émergé des nombreuses valises, donnant lieu à cette exposition qui questionne l’époque, les enjeux climatiques, les traditions, les guerres, l’immigration et le monde en mutation. L’actualité méditerranéenne en particulier. Des interrogations éclairées et juvéniles émanant d’une jeunesse méditerranéenne en phase avec son existence. Cette même génération qui est déterminée à s’approprier tout un avenir méditerranéen en devenir.


Wadi Mhiri a ajouté sa touche personnelle des plus riches à l’aspect épistolaire de l’exposition en invitant les visiteurs à découvrir un au–delà invisible à travers un œil-de-bœuf. Une extension des plus édifiantes titrée «Les ailes du vent», hommage poignant à «toutes ces ombres qui ont traversé, traversent et traverseront encore la mer méditerranéenne, à la recherche d’un avenir meilleur ou pour une meilleure survie». Tout ce travail a été pensé à Hammamet autour d’un travail sur la francophonie, lorsque Wadi Mhiri devait un animer un atelier pour de jeunes Tunisiens. L’artiste devait gérer trois groupes de trente personnes, le temps d’une après–midi avec comme thématique choisie «La mer mère». Il explique : «J’ai choisi de dessiner le monde en présentant des toiles circulaires pour les jeunes participants. Le travail s’est déroulé sur trois étapes : au crayon, au collage, au dessin. Le résultat était excellent. Mais qu’allons–nous en faire après ? C’est ainsi que l’idée d’en faire une exposition était née et que j’ai eu l’idée d’envoyer les créations dans des bagages à main, des valises, un peu partout dans différents pays, en incitant ensuite d’autres correspondants adolescents à répondre, et ce, en usant du même médium et en jouant sur cette notion du voyage. Une dynamique s’est créée, elle a grandi, jusqu’à prendre cette forme finale. C’était vraiment un défi à mener à bout dans un temps serré et sans l’implication et la persévérance de tous ces jeunes, rien n’aurait pu se faire». Une valise, provenant de jeunes collégiens, a pu quitter le territoire libanais à temps avant le déclenchement des derniers bombardements menés récemment par Israël sur le Liban. L’exposition, qui possède une portée multiculturelle et profondément humaine, reste accessible jusqu’au 8 décembre 2024.


le-visible-2.jpg
Exposition «Le visible et l’invisible» de Wadi Mhiri : Des correspondances en valises
« Excursion » d’Una Gunjak : Le piège du mensonge
REVIEWS & CRITIQUES9 / 25 / 2024

« Excursion » d’Una Gunjak : Le piège du mensonge

Dans son premier long film « Excursion », au titre peu évocateur, la réalisatrice Una Gunjak (monteuse de formation) nous raconte une épreuve déroutante, vécue par une lycéenne, Iman, dans un lycée de Sarajevo — Bosnie Herzegovine. Une fiction utile qui s’inscrit amplement dans l’époque actuelle.


La caméra d’Una Gunjak filme en premier lieu une partie d’« Action ou vérité », jouée nonchalamment par un groupe de lycéens, vivant à Sarajevo. Rires, plaisanteries coquines et premiers émois adolescents fusent dès les premiers plans du film. Rien de plus banal,… et pourtant une blague bouleverse complètement le quotidien d’Iman, jeune fille aux prises avec un amour adolescent et innocent avec un garçon de son bahut. Se forme alors une spirale d’évènements, qui peuvent paraître futiles, mais qui s’empilent et s’enchainent jusqu’au déclenchement d’un cauchemar éveillé, révélateur d’une société ultra-conservatrice, moralisante, religieuse, rongée par une masculinité asphyxiante.


Une plaisanterie, déguisée en mensonge et qui en dit long sur l’intimité de la jeune fille, prend donc une ampleur considérable. Elle laisse, en effet, circuler une rumeur, qui dit qu’Iman est enceinte. La polémique éclate, le corps enseignant du lycée s’emballe et sa mère est alertée. Le vrai du faux se dilue dans un mouvement de foule incontrôlable et la situation échappe complètement à la jeune fille en crise… sans aucun retour possible en arrière ?


La rumeur affecte son relationnel, à commencer par sa meilleure amie, sa famille et l’entraîne dans une cabale violente menée par ses camarades. D’une grande maitrise esthétique, le récit, dénué de surprises et prévisible, parvient à retenir. Iman s’engouffre dans les méandres d’un mensonge, éveillant perplexité et interrogations. Pourquoi l’avoir fait ? Est-ce un besoin de s’affirmer ou de vouloir attirer l’attention d’un amoureux ? sont-ce les conséquences d’une maladresse juvénile ? « Excursion » miroite la société bosniaque et la raconte sans artifices, avec un réalisme saisissant. « Excursion » s’inspire de faits réels courants, qui n’ont pas échappé à sa réalisatrice Una Gunjak, présente en Tunisie à l’occasion de la sortie de son film.


« « Excursion » traite d’un tabou et a été pourtant si bien accueilli lors de sa sortie l’année dernière dans mon pays, la Bosnie. Il a suscité le débat et est parvenu à un public large, essentiellement jeune ». Commente-t-elle. Le drame, aux allures d’un Teen Drama, dénué de mièvreries, est un clin d’œil à l’importance de l’éducation sexuelle dans les écoles publiques.

excursion_517cee05ca.jpg

Il sensibilise ; Una Gunjak déclare dans un débat à l’espace Dar Jeelen : « Mon film est politique : il raconte le corps féminin dans une société conservatrice et religieuse, longtemps déchirée par la guerre et les affrontements jusqu’au renfermement. Un corps avec ce qui se passe autour : flirtes, premières fois, émois affectifs, regards de l’autre et non-dits au sein de la famille et du collège, manque de réflexion, de prises de positions, d’initiatives ou d’actions concrètes pour faire face à des injustices pareilles ».


« Excursion » narre, sur 1h30, « un piège des qu’en dira-t-on» et de ses conséquences. Une situation délicate qui fait échos dans de nombreuses sociétés dans le monde.

« Excursion » d’Una Gunjak : Le piège du mensonge
«Les bâtiments patrimoniaux de Hammamet» de l’A.E.R.E : Un guide contre l’oubli
REVIEWS & CRITIQUES9 / 17 / 2024

«Les bâtiments patrimoniaux de Hammamet» de l’A.E.R.E : Un guide contre l’oubli

Il s’agit d’un guide édifiant et d’une grande utilité, accessible à la vente et disponible en version papier : «Les bâtiments patrimoniaux de Hammamet», conçu par l’Association d’éducation relative à l’environnement, il a garni les librairies de la ville de Hammamet. Cette revue, richement illustrée, passe en revue les lieux historiques et emblématiques de la ville de Hammamet, permettant aux lecteurs d’en savoir plus sur l’histoire de ses célèbres édifices. Des endroits qui racontent des siècles d’existence.


Eclairer, édifier, rendre à la portée des jeunes tout un savoir et une mémoire… Tels sont les buts de cette parution destinée à la génération actuelle, aux jeunes d’aujourd’hui et à ceux de demain, plus conscients, curieux et innovants plus que jamais. Des jeunes qui pensent leur avenir tout en voulant avoir une connaissance approfondie de leur passé. L’architecture de Hammamet ne peut et ne tombera pas dans les oubliettes tant les lieux racontés au fil des 44 pages de la revue continueront à traverser le temps.

batiments_450x632_d0885278c5.jpg

De l’école des garçons, actuel collège Abou El Kacem Chabbi, aux remparts du fort, en passant par l’école des filles (actuelle école primaire Ali Belhouen), Dar Eyquem, Dar Sebastian (CCIH), ou encore la grande mosquée, le lecteur est subjugué par autant d’informations, qui se lisent d’une seule traite autour des 18 lieux narrés.


Le guide est préfacé par l’historien et ancien doyen de la faculté des Lettres de La Manouba, Hbib Kazadaghli, également natif de Hammamet. Il valorise les constructions en appelant principalement à leur préservation.


Un noyau de jeunes actifs de la ville et au sein de l’association relative à l’environnement, l’Aere, est derrière la conception de cet ouvrage, citons Asma Ghribi, Mohamed Yassine Sahli, Bedy Jeridi, Sofiène Meftah, Emna Jedidi, Emna Mejri, Ines Mejri, Synda Besbes, Fadoua Ouachani, Amal Torjmen, Firas Abdellaoui et Mohamed Sassi. Un travail de longue haleine mené à bout et appuyé par Mtir Mrad, Mehdi Ismail, Mohamed Mehdi Sahli, Tarak Souissi, Raouf Jebnoun, Hamdi Mrad, Salem Sahli, Romana Pimiskern, Kadhem Mankai, Chiheb Ben Fredj et Hajer Mrad.

«Les bâtiments patrimoniaux de Hammamet» de l’A.E.R.E : Un guide contre l’oubli
Lu pour vous | «Parler tunisien fissa !» de Hager ben Ammar et Valérie Vacchiani (Editions arabesques) : S’imprégner de «Tounsi»
REVIEWS & CRITIQUES8 / 28 / 2024

Lu pour vous | «Parler tunisien fissa !» de Hager ben Ammar et Valérie Vacchiani (Editions arabesques) : S’imprégner de «Tounsi»

En pleine saison estivale, il y a de ces livres qui viennent vers vous et qui font office de trouvaille. «Parler tunisien fissa !» de Hager Ben Ammar & Valérie Vacchiani, paru aux éditions Arabesques en 2018, s’impose efficacement comme une solution pour un lectorat désireux d’améliorer son dialecte tunisien. Un «Tounsi» de plus en plus lu et édité dans de nombreux ouvrages, spécialement durant les 6 dernières années.


Une typo attractive sur un fond bleu éclatant, couleur estivale. «Parler Tunisien Fissa !» est un ouvrage ludique, éducatif, divertissant et utile pour les lecteurs curieux de connaître notre jargon aux diverses sonorités et références. Le «Tounsi» est un dialecte arabe, qui fusionne termes berbères, siciliens, italiens, arabes, français. Un dialecte qui se distingue, à la fois drôle, à la composition complexe, facile (ou difficile pour certains !), mais qui porte ses fruits.


Accompagné d’un CD audio, «Parler tunisien Fissa !» se laisse feuilleter facilement… et écouter aussi. Paru à l’époque des livres audio, le livre continue d’être diffusé et offert à des curieux, désireux d’améliorer leur «Tounsi parlé».


Sur la couverture du livre, les potentiels lecteurs sont d’ores et déjà prévenus : il s’agit d’une méthode efficace d’initiation au dialecte tunisien mélangé, tantôt arabisé ou européanisé, aux nombreuses influences. Une méthode d’apprentissage qui apporte ses fruits «au bout de 6 mois», d’après les deux autrices Hager Ben Ammar & Valérie Vacchiani. Avec un entraînement régulier d’une durée de 30 minutes par jour, les lecteurs sont imprégnés par le vocabulaire et les notions d’échanges de base, qui peuvent leur être utiles au quotidien. Des étrangers vivant en Tunisie se sont offert le livre depuis sa parution et continuent de se le passer.


L’ouvrage est encore disponible en grand format dans toutes les librairies en Tunisie et en ligne aussi. 236 pages de contenu sont mis à la disposition des lecteurs intéressés avec un CD audio (Pour les acheteurs qui possèdent encore des lecteurs CD). L’ouvrage contient 20 leçons pour une meilleure insertion dans la vie quotidienne des Tunisiens, plus de 80 exercices d’entraînement corrigés, des explications claires accompagnées d’exemples, sans oublier un apprentissage de la lecture des lettres arabes et d’un système de phonétique simple pour lire rapidement et bien prononcer les sons. A l’ère du numérique et de l’infinie étendue de savoir accessible en ligne, «Parler tunisien Fissa !» parvient à se distinguer.

Lu pour vous | «Parler tunisien fissa !» de Hager ben Ammar et Valérie Vacchiani (Editions arabesques) : S’imprégner de «Tounsi»
«Goodbye Julia» de Mohamed Kordofani, actuellement dans les salles : La déchirure
REVIEWS & CRITIQUES5 / 20 / 2024

«Goodbye Julia» de Mohamed Kordofani, actuellement dans les salles : La déchirure

Il s’agit là d’une sortie phare, celle du long métrage soudanais « Goodbye Julia » de Mohamed Kordofani. Prix de la liberté dans la section «Un certain regard» au festival de Cannes en 2023 et ayant raflé une quinzaine de prix dans des festivals à travers le monde, le film très attendu nous vient du Soudan. Le pays se distingue par son cinéma qui voit difficilement le jour à cause de l’inexistence d’une industrie cinématographique.

La crise humanitaire qui sévit actuellement sur le terrain, résultante d’une succession de guerres civiles, n’arrange en rien la situation. Un pays qui se délite et dont la catastrophe humanitaire est éclipsée médiatiquement par d’autres, notamment par le génocide en cours en Palestine ou la guerre Russie / Ukraine. Une situation humanitaire sans précédent qui sert de toile de fond à des films qui font fureur à l’international. «Goodbye Julia» n’échappe pas à la règle !

good-bye-julia-aff.webp

Le film, d’une durée de 2h, plonge les spectateurs dans un Soudan en proie à des émeutes civiles en 2005, entre nordistes et sudistes.

Les destins de deux femmes que tout sépare se croisent, des suites d’un accident : la première est issue du nord, la deuxième du sud. La première femme est bourgeoise musulmane, l’autre est esclave et maman d’un petit garçon. Leur relation, ayant des airs de tragédies grecques, s’embourbe dans le contexte violent et perdure malgré tout dans le temps. Le drame est traité d’une manière classique, avec effets de surprise, mise en scène remarquable, jeu d’acteurs juste et musique omniprésente.


Sa problématique fait profondément écho à l’actualité déchirante. «Goodbye Julia» est l’histoire d’une réconciliation impossible entre deux femmes… et entre deux peuples. A découvrir !

«Goodbye Julia» de Mohamed Kordofani, actuellement dans les salles : La déchirure
«Poemas de Agua» d’Immaculada Montoya à l’Institut Cervantes Tunis: Peinture poétique
REVIEWS & CRITIQUES3 / 26 / 2024

«Poemas de Agua» d’Immaculada Montoya à l’Institut Cervantes Tunis: Peinture poétique

Inaugurée il y a trois semaines, l’exposition «Poemas de Agua» ou «Poèmes de l’eau» de l’artiste Immaculada Montoya est encore accessible au grand public jusqu’au 27 mars 2023 à l’Institut Cervantes de Tunis. De quoi s’offrir une immersion dans un univers pictural rétrécis, mais fait d’illusion, d’itinéraires brouillés, d’éclats ou d’associations.


Sept tableaux sont exposés dans l’enceinte d’une salle centrale à l’Institut Cervantes de Tunis. Des tableaux peints qui paraissent similaires, mais qui sont différents quand on les scrute, de très près en détails. Des éléments picturaux, perceptibles à l’œil nu. La mer ou l’eau les couvre… Une mer truffée de pointillé, sans doute, une présence massive d’individus, capturés d’en-haut, vue aérienne.

Poétiquement titrés «les poèmes de l’eau», ces tableaux sont signés Immaculada Montoya, artiste peintre espagnole, qui n’a pu être présente en Tunisie mais qui est parvenue à maintenir cette exposition, organisée par l’ambassade d’Espagne en Libye et l’Institut Cervantes. Mirages, évasion, cheminement sont des termes qui brouillent la vision des visiteurs.

329918961_184211697644397_2140126081433603956_n.webp

Le travail de Montoya, peinture à l’huile, s’inspire directement d’une poétesse arabe nommée Fawzyya Abu Khalid. Née en 1955, elle est poétesse, essayiste, sociologue et professeure de nationalité saoudienne. Sa poésie est connue pour ses motifs politiques proéminents et propulse les femmes du monde arabe vers l’éducation et la liberté. «Until When Will They Abduct You on Your Wedding Night? (1974)» est un recueil qui l’a fait connaître. Sont parus ensuite deux autres recueils de poésie, intitulés «Les lectures secrètes dans l’histoire du silence arabe (1985)» et «Mirage Water (1995)», lit-on en ligne. C’est probablement ce dernier recueil qui a inspiré le travail de la peintre espagnole Montoya. L’exposition a été initialement conçue pour être organisée à Tripoli, à l’ambassade d’Espagne en Libye.


Elle a finalement eu lieu à Tunis. Ciel, mer méditerranéenne, bordures, plages. Elle évoque des vies, des mouvements de masse, et une nature conquise, voire envahie. Des populations en mouvement à la recherche d’un avenir, d’une meilleure existence, d’une paix collective.

«Poemas de Agua» d’Immaculada Montoya à l’Institut Cervantes Tunis: Peinture poétique
Exposition «El Ghram Eli Fik» de Najoua Hassouna à l’Espace Sidi Ben Aissa à Hammamet : Peindre passionnément
REVIEWS & CRITIQUES5 / 16 / 2023

Exposition «El Ghram Eli Fik» de Najoua Hassouna à l’Espace Sidi Ben Aissa à Hammamet : Peindre passionnément

On ne peut que succomber à ce sentiment curieux et persistant de (re)découvrir Hammamet, de l’arpenter autrement à travers une touche picturale, celle d’une femme artiste-peintre, Najoua Hassouna, dont le nom ne vous dit peut-être rien, mais qui tient actuellement sa première exposition personnelle à l’Espace Sidi ben Aïssa (l’ASM de Hammamet), et ce, jusqu’au 20 mai en entrée libre.

C’est dans l’enceinte de l’Espace central Sidi ben Aïssa, en plein cœur du centre-ville de Hammamet, que se tient l’exposition-vente personnelle de l’artiste peintre Najoua Hassouna, qui, après avoir écumé les expositions collectives de la région de Hammamet, se lance à partir du 11 mai dans l’accrochage de sa première exposition personnelle.

najoua-hassouna-01.webp

C’est au gré des hasards que ses tableaux nous appellent. Faites uniquement à l’acrylique, ses œuvres, esquissées passionnément, révèlent un contenu qui a été déjà vu, à maintes reprises, mais qui se distingue par la touche féminine de son artiste. Fortement imprégnée par son vécu à Hammamet, elle raconte ses ruelles, sa médina arabe et l’architecture de ses édifices les plus emblématiques. Elle les dessine souvent dans les détails près, dans l’enceinte de sa médina historique, tout comme dans ses environs, à commencer par les poissons symboliques, son coucher de soleil, le golfe, quelques paysages sablonneux ou marins, qui font la beauté côtière de Hammamet, peinte à l’état initial, sans ses artifices hôteliers ou touristiques.


najoua-hassouna-02.webp

« El Ghram Eli fik », tel est l’intitulé de l’expo-vente, exprime la passion ardente de l’artiste, pour la peinture. Elle y raconte consciemment ou inconsciemment l’environnement dans lequel elle vit toujours, alternant souvent des portraits peints de quelques icones de la chanson arabe qu’elle adule ou qui l’attirent, citons Abdelhalim Hafedh, Om Kolthoum, ou même l’iconique Charlie Chaplin, en affichant sur ses tableaux quelques citations connues. Vortex en couleur, yeux ou des roses ponctuent aussi la découverte, sans oublier le clin d’œil à l’habit traditionnel local.

« El Ghram Eli Fik » est le titre d’une exposition subjective, qui traduit une passion presque juvénile pour la peinture, entretenue par Najoua Hassouna. Cette expo-vente pourrait éventuellement attirer les amoureux de la ville, les visiteurs passagers, qui affluent actuellement en pleine saison estivale et qui aimeraient découvrir les villes… d’une autre manière.

Exposition «El Ghram Eli Fik» de Najoua Hassouna à l’Espace Sidi Ben Aissa à Hammamet : Peindre passionnément
Facebook
Twitter
Instagram
LinkedIn
haithemhaouel221@gmail.com