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«Kim Yip Tong », réalisatrice de « Pie Dan Lo» : « C’est l’histoire d’un pays qui se soulève pour l’écologie et la mer »
ENTRETIENS2 / 13 / 2025

«Kim Yip Tong », réalisatrice de « Pie Dan Lo» : « C’est l’histoire d’un pays qui se soulève pour l’écologie et la mer »

Seule participation mauricienne à la 47e édition du festival international du court métrage de Clermont-Ferrand, la jeune réalisatrice Kim Yip Tong bouleverse par la portée de son sujet, sublimement esquissé dans son court métrage titré «Pie Dan Lo» ou «Black Tide» en langue anglaise. A l’aune d’une époque chamboulée par les catastrophes environnementales, la réalisatrice fait voyager son public dans sa terre d’origine, l’île Maurice.


Propos recueillis par Haithem HAOUEL, envoyé spécial au festival de Clermont-Ferrand


A travers son film, elle raconte une tragédie, qui, cinq ans auparavant, a marqué durablement la conscience collective des habitants de son île. Un trauma qui, de nos jours, persiste et se mue dans un silence douloureux vécu en collectivité. Le récif de l’île Maurice, mondialement connu pour sa biodiversité unique, est frappé de plein fouet par un paquebot de pétrole, qui échoue et déverse sa matière dévastatrice sur une bonne partie des côtes de l’île. Véritable catastrophe naturelle, qui a fait écho en pleine pandémie, elle a chamboulé à jamais les vies des péninsulaires sur place. Contre l’oubli et dans le but de rendre hommage à son peuple plus que jamais solidaire face à cette tragédie, «Kim Yip Tong» tenait à faire revivre les faits dans un film d’animation, construit en témoignages audio et en dessins et peintures. Rencontre au sommet !


Quelle est la genèse de cette réalisation filmique courte mais distinguée, sélectionnée dans la catégorie «Kids» et «Regards d’Afrique» au festival de Clermont-Ferrand de 2025 ?


Je suis plasticienne de base, influencée par des films expérimentaux visionnés dans des planétariums ou des résidences artistiques. Je me suis déjà essayée à la réalisation en sortant un petit film en 2018. Cette fois–ci, «Black Tide» est concrètement mon premier film produit. C’est un court métrage documentaire d’animation qui évoque la marée noire qui a ravagé l’île Maurice en 2020. Il est retenu dans la sélection «enfants» des plus de 9 ans et dans «Regards d’Afrique» à Clermont-Ferrand.


Qu’est-ce qui vous a urgemment poussée à raconter cette tragédie de la marée noire dans un film court ?


C’est l’histoire d’un pétrolier japonais qui s’est écrasé sur le récif de l’île Maurice et qui est resté sur place pendant deux semaines avant de commencer à couler et a déversé toute sa matière polluante. Face à l’inaction des autorités, ce sont les habitants qui se sont soudés afin de faire face à la catastrophe. C’est un élan de solidarité sans précédent qui a eu lieu. Ils se sont servis de leur propre bateau, et en usant de moyens et d’anecdotes efficaces pour contenir ce pétrole déversé. Pour moi, c’est ainsi que naissent les mythes. Ça puait la mort, il y a eu évacuation des écoles et de lieux, des familles ont perdu leur travail, et le tout vécu en pleine pandémie mondiale. Les habitants ont été solidaires plus que jamais, et cette tragédie a été le début de manifestations et de contestations uniques. C’est l’histoire d’un pays qui se soulève pour l’écologie et la mer. Cette histoire m’a profondément imprégnée et m’a poussée à la raconter dans «Pie Dan Lo». Une société de dépollution grecque est intervenue bien plus tard pour nettoyer le désastre pétrolier. Cette même société a une fondation qui commissionne les films qui traitent de désastres écologiques spécialement provoqués par le pétrole. J’ai eu un petit budget pour le réaliser.


Peut-on en savoir plus sur le processus de création ?


Cette histoire a détruit des vies, des familles, a bousillé la santé d’individus, et une biodiversité entière. Mon travail a consisté à recueillir les propos et témoignages des habitants, en créole ou en français. A partir de témoignages, j’ai dessiné et peint les faits. Une manière de faire appel à ma discipline première et initiale, qui est de peindre. Ça a fait un film documentaire par la puissance des témoignages, génériques, métaphoriques et symboliques et par ses images. Pendant un mois et 3 semaines, j’ai retranscrit et écouté les audios recueillies et créé la bande-son. Ensuite, je me suis focalisée sur l’animation et la levée de fonds. Le film est produit par «Gao Shan Animation Studio Maurice»/ «Gao Shan Pictures» et «We Film». Tous les décors sont peints à la main. L’animation, la rotoscopie et la colorisation sont réalisées par Amandine Boyer, Pénélope Camus, Gloria Vivien, Uma Burrenchobay et moi–même.


Comment avez-vous vécu la catastrophe ?


Le bateau est arrivé le 12 juillet 2020. Il est resté 12 jours avant de commencer à couler. Je suis allée toute seule sur place. Il y avait déjà une centaine de personnes déjà présentes. La citoyenneté et la solidarité créées autour m’avaient marquée. J’ai ressenti l’entraide et pris quelques images, mais j’avais plus envie de vivre l’instant présent et de m’imprégner de tout ce que je vivais et vivaient les Mauriciens autour, et de ne pas tout vivre derrière un écran. C’est un film qui a vu le jour, avec beaucoup de ressentis, de sentiments. Je l’ai vécu de l’intérieur sans beaucoup d’images ou de vidéos prises. Ce dont je reste fière c’est la réception du public à l’île Maurice. Bouleversant à souhait, il a suscité énormément d’émotions. Nous l’avons projeté devant plus de 700 personnes pas loin de l’endroit où a échoué le paquebot. C’est un travail de mémoire qui a été fait.

«Kim Yip Tong », réalisatrice de « Pie Dan Lo» : « C’est l’histoire d’un pays qui se soulève pour l’écologie et la mer »
« Bord à bord » de Sahar el Echi : Eclat de vie
REVIEWS & CRITIQUES2 / 12 / 2025

« Bord à bord » de Sahar el Echi : Eclat de vie

Mounira s’abîme dans la grisaille d’un quotidien dur et austère pour gagner sa vie. En guise d’échappatoire, elle se retrouve tiraillée entre deux relations parallèles, vécues en dents de scie. A l’affiche du 5e film court de Sahar El Echi, un trio d’acteurs : Mariem Sayah, Mohamed Hassine Grayaâ et Aymen Mejri.


Il s’agit de sa première fiction courte, avec les ingrédients d’une trame dramatique captivante et les éléments nécessaires pour entraîner le spectateur dans une histoire, de « Bord à bord ». La jeune femme, silhouette frêle, préoccupée au quotidien par les aléas de la vie, tient incessamment à subvenir à ses besoins en vendant des fricassés dans la carcasse d’un wagon abandonné. Elle voit son quotidien écorché par la brutalité d’un homme écrasant et par la légèreté d’un 2e jeune homme, plus attentionné, attachant. Mounira tente de gérer son relationnel, doublement broyée par la rudesse du lieu dans lequel elle vit. Telle une fable, ou un conte des temps modernes, le film s’achève autrement…


Sahar El Echi fait du lieu un 4e personnage. Il s’agit d’une décharge d’anciens véhicules usés, située dans une zone pauvre. Y faire gambader ses personnages donne un ton distingué à son film. Une dimension qui raconte les difficultés d’une frange sociale du pays, délaissée, précaire, oubliée. Celle d’une classe sociale qui ne vit que pour casser sa croûte au jour le jour mais qui (sur)vit en dépit des difficultés d’ordre matériel, social, et a chassé les hostilités. Mounira vit dans un milieu extrêmement patriarcal, masculinisé et parvient à s’imposer en s’attachant à son bien ultime : son modeste commerce de vente de fricassés.


« Bord à bord » s’achève un peu trop vite, à l’instant T où on commence à se familiariser avec les personnages. Sur 18 min, les aspirations et les rêves d’une existence meilleure prennent le dessus, et forment un hymne à la vie et un appel à la conquête d’autres cieux. Rester, oui, ou pourquoi ne pas répondre à l’appel d’un «Partir» aussi ? «Bord à bord» ou «Al Haffa» continue sa tournée dans les festivals internationaux. Il a été projeté au «Red Sea Festival» et compte partir à l’affût d’autres compétitions. Dans cette 35e édition des Journées cinématographiques de Carthage, il est en compétition officielle des courts métrages de fiction. Sa réalisatrice Sahar El Echi a déjà, à son actif, 4 courts métrages : «In Between», «Correspondances», «Mutation» et «Manwella». Le dernier en date s’affranchit des essais expérimentaux, réalisés auparavant et s’impose dans un nouveau genre maîtrisé.

« Bord à bord » de Sahar el Echi : Eclat de vie
Vient de paraître – Amara Ghrab : Peintre et architecte épris de lumière » de Nadia Ghrab : Une vie, une œuvre
PORTRAITS / PÊLE - MÊLE 2 / 11 / 2025

Vient de paraître – Amara Ghrab : Peintre et architecte épris de lumière » de Nadia Ghrab : Une vie, une œuvre

Avec sa couverture attrayante, qui met en lumière un tableau de peinture sur fond bleu, cette deuxième parution spéciale, signée Nadia Ghrab, séduit par sa portée. L’auteure de « Dépassements » consacre son récent beau livre à son époux feu Amara Ghrab, peintre et architecte, à l’œuvre picturale et architecturale universelle.


Le livre est paru il y a une dizaine de jours, un certain 31 janvier, également date de naissance de l’artiste solaire, né à Zarzis, qu’a été son époux. Une manière de rendre hommage à une âme libre, aimante, sensible et particulièrement dotée d’une fibre artistique à part. Architecte visionnaire, depuis plus de 30 ans, son œuvre picturale se démarque par sa justesse, son empreinte, ses inspirations. Ayant vécu dans le sud de la Tunisie, à Tunis, en passant par Paris, Le Caire et en sillonnant divers pays, Amara Ghrab a été le témoin d’une époque historique marquée par les batailles menées au nom de l’humanisme et de la liberté, celle des années 60 et 70. Son engagement s’est toujours fait sentir pendant toute sa vie.


Un livre d’art, celui d’une vie


Au fil des pages de « Amara Ghrab : peintre et architecte épris de lumière », poésie, couleurs, peinture et lignes se mêlent aux textes-hommage de Nadia Ghrab, son épouse, qui a tenu à faire connaître celui qui l’a accompagnée pendant toute une vie. Un peu plus d’une année après son décès, ce livre voit le jour. Une compilation de toutes ses peintures, ses écrits, photographies personnelles, artistiques habiteront désormais cet ouvrage qui raconte une vision artistique certes, mais aussi tout un pont de l’histoire. Discret, l’artiste savait briller tout en restant humble, créatif et prolifique. Ce beau livre est une fenêtre sur un savoir architectural et artistique unique, commenté par des critiques d’arts et artistes tels que Hichem Ben Ammar, Faouzia Sahly ou Amor Ghedamsi, qui l’ont connu et côtoyé de près de son vivant. Le livre est composé de 160 pages, avec des textes en français et d’autres en arabe.


Amara Ghrab est né à Zarzis en 1945 et s’est éteint à Tunis en 2023. Il commence sa formation de peintre à l’Ecole des Beaux-Arts de Tunis, reçoit le prix du Salon de peinture en 1967 et tient ses premières expositions personnelles en 1968. Boursier de l’Etat, il parfait sa formation aux Beaux-Arts de Paris. Là, il s’initie, à côté de la peinture, à différentes pratiques artistiques, théâtre, musique, et aux grands mouvements de pensée qui secouent alors le monde. Puis, il entreprend des études d’architecture à Paris. De retour à Tunis en 1981, il consacre l’essentiel de son temps à la pratique de l’architecture et à son enseignement. A partir de 2005, il se donne entièrement à la peinture.


Avec le soutien du ministère des Affaires culturelles tunisien, un vernissage des œuvres d’Amara Ghrab se tiendra à la Maison des arts du Belvédère à Tunis le 15 février 2025. L’exposition rétrospective autour de l’artiste sera accessible sur place pendant tout un mois jusqu’au 15 mars 2025 et s’appellera « Lignes en Transe ». Le livre sera en vente dans toutes les librairies de Tunis et pendant le vernissage.

Vient de paraître – Amara Ghrab : Peintre et architecte épris de lumière » de Nadia Ghrab : Une vie, une œuvre
Section « Regards d’Afrique » à la 47e édition du festival de Clermont-Ferrand : Vue sur courts
REPORTAGES2 / 10 / 2025

Section « Regards d’Afrique » à la 47e édition du festival de Clermont-Ferrand : Vue sur courts

La passion pour le 7e art est palpable à Clermont-Ferrand, ville connue pour son festival international des films courts depuis des décennies. Historique et engagée, cette manifestation draine des réalisateurs des quatre coins du monde.


De notre envoyé spécial à Clermont-Ferrand Haithem HAOUEL


En 48h chronos, une spirale de films courts vous happent … Le monde paraît défiler en écran large et sous vos yeux. Entre l’inédit et le rétrospectif, quelques découvertes sur grand écran n’ont pas laissé de marbre, surtout quand on évoque « le cinéma du Sud », émergeant, définitivement installé dans un cinéma du monde, florissant et visible en abondance dans la programmation du premier festival des films courts au monde.


Cette 47e édition du festival international du court métrage de Clermont-Ferrand consacre en 2025, dans sa très large programmation, quatre sections LBN, consacrées au cinéma libanais et une autre « Regards d’Afrique – African Perspective », entièrement dédiée au cinéma africain. Des essais courts, qui oscillent entre fictions et documentaires, révélateurs de maux sociaux omniprésents. Ils font échos en traversant les cultures du monde et luttent contre l’oubli. Un cinéma du Sud qui éveille les consciences et qui crie tout haut le conflit soudanais, les heurts au Kenya, la condition de la femme africaine, les guerres successives au Liban, la famine, le réchauffement climatique… Autant de problématiques traitées qui se succèdent et ne se ressemblent pas.


Face à l’intérêt grandissant d’un public averti, cette floraison de scénarios titille les réflexions, suscite le débat, lève le voile sur des thématiques diverses… et se fait entendre.


La passion pour le 7e art est palpable à Clermont-Ferrand, ville connue pour son Festival international des films courts depuis des décennies. Historique et engagée, cette manifestation draine des réalisateurs des quatre coins du monde. Cette 47e édition a connu la participation remarquée d’une réalisatrice tunisienne montante, Sahar El Echi, avec son 5e film « Bord à bord », retenu dans la section « Regards d’Afrique », unique participation tunisienne. Son actrice principale, Meriem Sayah, a aussi répondu présente, afin d’accompagner les projections du film, déjà projeté lors des JCC 2024. Cette histoire courte raconte l’affranchissement social d’une femme, confrontée à sa condition sociale difficile, et contrainte de subir les aléas relationnels vécus avec deux hommes, interprétés par Mohamed Hassine Grayaa et Aymen Mejri. Le film a suscité le débat tout comme l’ensemble de la section « Regards d’Afrique » qui a regorgé de découvertes pour la plupart inédites. Passage en revue !


We shall Not Forget (Nous n’oublierons pas) de Brian Obra : contre l’oubli


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Terriblement oppressif et violent, le documentaire de 4 min est un cri d’alerte collectif. Celui d’une génération meurtrie et violentée au Kenya. Heurts urbains et révolte anti-sociale constituent la trame de fond du documentaire signé Brian Obra. Comme son titre l’indique, toute une génération de jeunes Kenyans se dresse contre l’Etat et laisse derrière elle un constat glaçant. Une parenthèse d’une violence inouïe est mise en lumière dans ce film court, dont la portée est de se souvenir de cette révolte de jeunes contre l’injustice et la corruption étatiques. Manifestation sanglante et slogans descendus révèlent la désillusion d’une génération et son asphyxie. Des jeunes «du clavier» jettent leurs machines et affrontent corps à corps les forces de l’ordre suite à la proclamation d’un projet de loi financier qui menace leur avenir.


Is it War ? (Est-ce la guerre ?) de Timeea Mohamed Ahmed : l’expérimental au service de la paix


Le 2e film visionné tourne autour d’une guerre toujours en cours au Soudan, sans doute une des plus meurtrières de l’histoire contemporaine. A travers un traitement innovant et moderne, cette fiction, signée Timeea Mohamed Ahmed, nous présente Jaâfar, son personnage principal errant. Telle une âme détachée de son corps, il se laisse errer dans une forêt. Surréaliste à souhait, le film est une échappée mentale pour son héros qui fuit la mort ambiante dans son pays. Une manière de sauver (ou pas) son esprit, sa santé, son existence. Filmé via des techniques développées visuellement, le ton reste léger, et le contenu dénué de toute violence visible. Le symbolisme autour de la misère du peuple soudanais parvient intelligemment et d’une manière insolite à un large public, généralement mutique face à cette catastrophe humanitaire. Le cinéma soudanais ne cesse de s’exporter depuis les 7 dernières années.


Time To Change (Il est temps de changer) de Pocas Pascoal : une plongée dans l’histoire


Ce court film fait office d’un document historique et éveille les consciences. Il nous vient de l’Angola et à travers un montage expérimental d’une grande maîtrise, il puise dans des archives coloniales rares. Il raconte en un temps limite l’asservissement de tout un peuple par son colonisateur. Misère, famine, maltraitance et exploitation rongent cette réalisation. Ce film reflète, tout haut, la naissance du capitalisme, sa propagation dans le monde et crie son essence même… qui ne date pas de nos jours. Une relation colons /colonisés, toujours d’actualité. Le suprématisme blanc et son emprise broient des peuples pillés, spoliés, appauvris et… ce document expérimental l’atteste.


Alazar de Beza Hailu Lemma : tragédie en terre aride


Ce film frôle le format « Moyen métrage ». Il bouleverse par la profondeur de son histoire maîtrisée. Son scénariste s’est permis une liberté d’écriture ressentie au fil des évènements visionnés, au point où le court a failli lui échapper. Cette plongée dans le vécu d’une tribu éthiopienne bouleverse par sa sincérité. « Alazar » raconte l’exode d’une communauté paysanne, désireuse urgemment de quitter son territoire de naissance pour subvenir à ses besoins les plus élémentaires, afin d’éradiquer pauvreté et famine. Leur terre ne devenait plus fertile, et la pluie se faisait rare. Suite à la découverte du corps d’un patriarche dans un puits sec, les convictions et pratiques religieuses se retrouvent ébranlées et une enquête est entamée afin de découvrir les dessous de cette mort, quitte à remettre en question les déductions d’un homme de l’église. Et c’est le fils du défunt qui entame cette quête.


Breastmilk (Lait Maternel) d’Ifeyinwa Arinze : L’affranchissement d’une mère


Cette fiction courte de 16 min traite de plusieurs tiraillements, vécus par Aduke, jeune mère nigériane, qui doit se réconcilier avec son passé pour pouvoir s’accomplir dans le présent, quitte à chambouler sa relation déjà tendue avec son mari, esquiver les croyances superstitieuses de son entourage et surtout pouvoir allaiter son nouveau–né. Cette embrouille afflue sur son corps et perturbe l’allaitement par voie naturelle. L’interprétation féminine de l’actrice principale ne laisse pas indifférent et retient l’attention de bout en bout. Entre consultation médicale, heurts avec un mari infidèle et la naissance de son bébé, sa condition de femme et de mère peine à trouver le juste équilibre…pire, elle est écrasée. Le court métrage lève le voile sans retenue sur des dérives sociales, qui peuvent surgir souvent au sein même du noyau familial. Pour les confronter, autant couper les chaînes et chasser ce qui se présente comme des obstacles à l’épanouissement. Une leçon de vie !


Clap de fin de la 47e édition du Festival international du court métrage de Clermont-Ferrand : l’édition en chiffres


Le palmarès officiel est constitué des prix remis par les jurys officiels, étudiants et publics dans chacune des trois compétitions. Cette 47e édition, en plus de ses compétitions, a mis à l’honneur le cinéma libanais ainsi que l’importance du son dans les films. Elle a enregistré un bilan positif avec plus de 4100 professionnels accrédités par le Marché du film court et un nouveau record battu : plus de 173 000 entrées ! À noter que ce nombre d’entrées a été possible sur 454 séances réparties sur les 14 salles qui ont accueilli le festival. 34 stands ont fait vivre le Marché du court. 51 pays étaient représentés dans les trois grandes compétitions et au palmarès, 26 pays sont représentés : Allemagne, Australie, Belgique, Brésil, Canada, Égypte, États-Unis, France, Irlande, Islande, Italie, Kosovo, Liban, Maroc, Mexique, Palestine, Philippines, Royaume-Uni, Sénégal, Singapour, Slovaquie, Suède, Suisse, Taïwan, Tchéquie et Ukraine. Le festival rempile déjà du 30 janvier au 7 février 2026.


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Section « Regards d’Afrique » à la 47e édition du festival de Clermont-Ferrand : Vue sur courts
Catherine Cormier–Larose , poète et directrice du festival de poésie de Montréal : « J’ai cette certitude que la poésie embellit le monde »
ENTRETIENS2 / 2 / 2025

Catherine Cormier–Larose , poète et directrice du festival de poésie de Montréal : « J’ai cette certitude que la poésie embellit le monde »

Dans le cadre d’une tournée en Tunisie, effectuée à l’occasion de la parution de «Kaléidoscope», une anthologie de poésie québécoise, traduite en arabe, Catherine Cormier-Larose entretient ce dialogue entre deux cultures, deux nations, et s’adresse au monde à travers la poésie. Cette aventure littéraire est un foisonnement de mots qui magnifie l’époque, menée collectivement.


«Kaléidoscope», votre anthologie de poésie, a été présentée à un large public à la librairie Al Kitab Mutu, ensuite, dans le cadre d’un club de lecture à haute voix, fondé récemment à Hammamet et prochainement, elle sera présentée à l’Institut Français de Sousse. Que pouvez-vous nous dire de plus sur cet ouvrage de poésie distingué ?


Dans le cadre du festival international de la poésie qui a eu lieu en avril 2024, il y a eu une présence québécoise importante. Poètes et poétesses ! On a tenu à ce que leur passage en Tunisie et leur participation demeurent. Que leur partage de la poésie reste ! C’est difficile de se lire à l’international et d’avoir accès à la poésie mondiale. En créant cette anthologie de 30 poètes et poétesses québécois, on les a traduits en langue arabe, ainsi les Tunisiens pouvaient les lire, nous permettant de les faire entrer dans une poésie québécoise qui dialogue avec la Tunisie, et en entretenant cette croyance en une poésie… qui est salvatrice. Avec Moez Majed, le fondateur du festival, nous trouvons que la poésie peut être un vecteur de paix, qui rend accessible tout ce qui est inaccessible, qui renforce le partage des valeurs, crée une communion universelle, au-delà des différences. La poésie a été traduite par le Tunisien Ashref Kerkeni, révisée par Khalil Khalsi, les deux sont spécialistes en lettres. Moez Majed a assuré la direction littéraire du projet, en faisant attention à bien traduire les expressions québécoises.


Comment s’est passé ce processus de traduction poétique ?


Initialement, on a travaillé avec une équipe qui croit profondément en une poésie traduite, en une poésie qui doit l’être et qui doit être faite par des poètes. Le poème est plus important que « le mot à mot » ou du mot juste. Ce sont des traductions créatives. L’écriture a une âme. On a traduit en gardant l’idée du poème en langue arabe. On écrit avec le cœur.


Parlez-nous de votre festival international de la poésie à Montréal ?


Depuis quelques années, la direction du festival de la poésie de Montréal, qui est un festival uniquement dédié à la poésie, très local et annuel, essaie d’attirer des poètes de partout du Québec avec un aspect lié à la francophonie. Chaque année, on essaie de travailler, discuter et échanger avec des poètes de par le monde, de la Tunisie et du monde arabe. D’où notre connexion au festival international de la poésie de Sidi Bousaid. En Tunisie, on publie beaucoup en français, d’où ce rapport fluide qui s’est créé. On est en train de travailler sur une revue de 12 poètes tunisiens et tunisiennes, 6 arabophones et 6 francophones, qu’on veut avoir dans une revue spéciale. Emna Louzir a d’ailleurs été enregistrée. Il y a des choses de ce partage qui perdurent, créant ainsi des liens, en changeant les idées, afin de communier et de communiquer. On fait de la poésie un vecteur de changement.


Pour « Kaléidoscope », votre dernière anthologie, comment s’est faite la sélection des 32 poètes et poétesses ?


La sélection d’une anthologie est toujours un brise-cœur. Avec Nora Attala, j’ai codirigé la publication. C’est une poétesse québécoise et le travail s’est fait à deux. Elle voyage beaucoup, partout dans le monde. C’est une poète qui sème la poésie québécoise partout. On a choisi des poètes très importants, qui écrivent et font œuvrer la poésie, qui la publient et la tissent, avec des poètes moins connus d’ailleurs : D’Ottawa, d’origine italienne, autochtone, du Guatemala. En mélangeant, on a créé ce « Kaléidoscope ». Les poétesses arabes retenues sont canadiennes avec des origines arabes. La poésie québécoise a mis beaucoup de temps à s’ouvrir sur le monde. Nous sommes la seule région francophone du Canada, et avons bataillé pour notre patrimoine linguistique, qui fut un véritable combat. C’est tout un travail de générations. La peur de perdre notre langue est omniprésente. Nous vivons dans un monde avalé par le culture « américaine », des Etats-Unis spécifiquement. C’est l’époque ou jamais de se protéger contre cette culture mondialisée.


Quelle place a la poésie au 21e siècle, particulièrement en 2025 ?


Les gens souffrent beaucoup de nos jours. Sur le plan personnel mais aussi à cause de l’état de notre monde, des guerres qu’on n’a pas choisies de vivre, du capitalisme ambiant, de la violence inerrante. La poésie allège les maux. C’est une manière de rassembler, d’unir, de créer des communautés tout en étant rebelle et résistant. J’ai cette certitude que la poésie embellit le monde. C’est une fenêtre qui permet d’entendre les voix des autres.


Un dernier mot sur la couverture remarquable de l’ouvrage « Kaléidoscope » ? Nous ne restons pas indifférents à la photographie choisie.


Pour l’anthologie, on cherchait une manière de la présenter. Cette publication est importante au Canada et en Tunisie, mais nous espérons qu’elle fasse échos dans le monde arabe et ailleurs. La photo sublime qu’on a choisit fait référence à la Tunisie. Elle est signée Mehdi ben Temessek, photographe, poète et architecte de formation. Elle évoque l’artisanat, le ciel ouvert, le drapeau blanc, la carte et la page blanche. Ce tissu visible sur la couverture est tunisien.

Catherine Cormier–Larose , poète et directrice du festival de poésie de Montréal : « J’ai cette certitude que la poésie embellit le monde »
Catherine Ceylac et Fatma ben Saidane dans « Conversation intime » : Une rencontre unique
PORTRAITS / PÊLE - MÊLE 1 / 31 / 2025

Catherine Ceylac et Fatma ben Saidane dans « Conversation intime » : Une rencontre unique

Un rendez–vous spécial est prévu à l’Agora dans la soirée du 31 janvier 2025 à partir de 19h00 entre la célébrité française du petit écran, Catherine Ceylac, qui, le temps d’un épisode de son programme « Conversation intime », donne la parole à une icône tunisienne du théâtre, du cinéma et de la télé, Fatma Ben Saidane.


C’est sur la scène de la salle de l’Agora que cette rencontre aura lieu entre deux femmes connues. L’une est issue de la télé culturelle française, célèbre pour son émission « Thé ou Café », Catherine Ceylac et la comédienne tunisienne Fatma Ben Saidane qu'on ne présente plus. La présentatrice vedette de la télévision française sera en Tunisie pour cet épisode spécial de « Conversation intime », son nouveau concept filmé.


La rencontre s’annonce sous le signe de l’émotion et de la surprise. Catherine Ceylac plonge d’une manière rétrospective et en immersion dans la carrière de l'artiste, grandement accomplie. Différents aspects, une multitude de rôles marquants, des films classiques et des pièces de théâtre incontournables seront évoqués. Cette conversation lève le voile sur une véritable personnalité tunisienne, entre émotions, moments tendres, échanges édifiants, anecdotes partagées. Une manière de rapprocher encore plus l’actrice de son public et de lever les voiles sur des détails, probablement méconnus autour de son savoir – faire et de sa vocation.


Sa condition de femme actrice, son amour pour la scène, sa relation avec ses admirateurs, ses acolytes et à la création de ses chefs- d’œuvre seront évoqués pour le public présent. Plus de 50 ans de carrière ! Les difficultés de son métier seront également dévoilées dans un portrait tracé, d'une durée de 90 min.


Le travail de Catherine Ceylac est désormais accessible en Podcast. Après son émission de télévision «Thé ou café», connue par toute une génération, son public la retrouve toujours dans un format « entretiens » très prisés par son audimat comme par ses invités. Par son charisme, son tempérament unique et sa voix reconnaissable, elle séduit toujours.

Catherine Ceylac et Fatma ben Saidane dans « Conversation intime » : Une rencontre unique
Le projet « Cinématdour » : Une pérennité et des chiffres
PORTRAITS / PÊLE - MÊLE 1 / 20 / 2025

Le projet « Cinématdour » : Une pérennité et des chiffres

S’il y a un projet à caractère cinématographique et social qui a résonné auprès d’un large public, c’est bien « Cinématdour ». Son impressionnant véhicule fait toujours office de salle de cinéma pour de nombreux citoyens tunisiens qui ne connaissaient rien du 7e Art ou qui n’ont jamais accédé à une salle obscure. « Cinématdour » continue de sillonner les régions intérieures, le sud tunisien et autres villes parfois isolées, souvent méconnues ou défavorisées.


La Presse — En Tunisie, le cinéma n’a pas été auparavant aussi à la portée et accessible. « Cinématdour » fait écho auprès d’un public qui n’hésite pas à partir à la découverte ou à expérimenter. Ce bus se déplace, se transforme en salle de cinéma et existe depuis plus d’un an. Il génère un intérêt sans cesse grandissant, rassemble des adhérents, initie souvent aux projections cinématographiques, touche toutes les franges sociales, diffuse au plus loin cet art. Rien qu’en 2024, des milliers de personnes ont vécu l’expérience et ont formé spontanément une communauté « Cinématdour ».


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Des routes et des accomplissements


Rien qu’en une année, « Cinématdour » c’est 528 séances de cinéma, films tunisiens, internationaux et inclusifs pour malentendants et malvoyants. C’est 22.294 entrées générées dont 13.450 dans le cadre des programmes RSE et 1099 tickets offerts à des associations et à des jeunes en situation d’handicap ou de vulnérabilité. La musique a été très présente avec l’organisation des 4 cinés – concerts et de 2 concerts en plein air. Un pré-lancement a eu lieu à Ain Zaghouan en janvier 2024, avec une conférence suivie d’un concert de la chanteuse Imen Khayati. La phase de pré-lancement a duré jusqu’en avril dans la région du Grand Tunis, puis direction Gabès à partir du mois de mai 2024. L’équipe a largué les amarres sur place jusqu’à mi – juillet 2024 en enchainant et la ville de Gabès et les délégations autour comme Matmata et la nouvelle Matmata, El Hamma, Menzel El Habib, Zarat, Chenini. Le moment fort dans ce gouvernorat reste sans doute la participation du « Cinématdour » au festival « Gabès Cinéma Fen » et l’organisation des 4 cinés-concerts « Feelings » avec Kaso, Une participation fructueuse avec ses 68 séances et ses 2.788 entrées.


Direction Tozeur, en octobre avec le programme RSE et son arrêt au centre-ville de Nafta. La présence de « Cinématdour » sur place a généré 7.292 entrées pour 91 séances de films. Un concert avec Halim Yousfi et « Gultrah Sound System » a également été organisé.


Le passage à Tozeur n’a pu se faire sans un arrêt à « Dar Chraiet » : sur place ont été réalisées 19 séances et 691 entrées. En novembre 2024, c’était autour de Gafsa d’accueillir le bus magique en réalisant 66 projections pour 3.353 spectateurs. Dans la région Jammel à Monastir, c’est 200 séances effectuées pour 2.193 entrées offertes. Presque une année plus tard, c’est retour à Tunis, pour la réalisation d’un programme phare « Ciné – santé », organisé par l’OMS et qui a sensibilisé sur les enjeux prioritaires à la santé publique.


L’évènement s’est déroulé à Hay Hlel, dans un centre de protection maternelle et infantile en 56 séances ciné-débats, ramassant 3.965 entrées offertes, et organisant 11 ateliers d’apprentissage artistique et 33 rencontres avec des personnalités culturelles, médiatiques et sportives. L’année précédente fut fructueuse et amplement validée. Pour 2025, des projets ciblés verront davantage le jour et une vision ambitieuse s’apprête à se concrétiser sous un slogan « Ensemble pour 2025 : Construisons un impact durable et solidaire ! ». « Cinématdour » encourage à être actif socialement et sur le plan culturel, tout en soutenant l’accès à la culture pour tous. L’initiative promeut des valeurs universelles d’éducation, d’inclusion et de solidarité, inspire les générations futures grâce à ses accomplissements et renforce votre engagement sociétal en investissant dans des projets à empreinte durable. Pour suivre l’actualité « Cinématdour », suivez le projet sur les réseaux sociaux.

Le projet « Cinématdour » : Une pérennité et des chiffres
Programme «Diasporactive» : Retour au bercail
REPORTAGES1 / 17 / 2025

Programme «Diasporactive» : Retour au bercail

A l’aube d’une nouvelle année, il y a de ces initiatives qu’on voit défiler et qui semblent être en phase avec leur époque. « Diasporactive » en fait partie. Ce programme incite de jeunes entrepreneurs tunisiens, installés à l’étranger, et même ceux qui ambitionnent de devenir investisseurs, à implanter leurs projets dans leur pays d’origine. Tout un programme édifiant leur a été préparé pour un retour au bercail.


La Presse — En rencontrant ce noyau de jeunes Tunisiens, résidents à l’étranger, l’espoir renaît grâce à leur volonté de s’accomplir dans leur pays et d’y apporter leurs pierres à l’édifice. Déployer ses ailes et apprendre à l’international, c’est sans doute important mais s’implanter dans son pays d’origine reste à l’ordre du jour. Dans une époque où on évoque le plus souvent la migration vers d’autres cieux et la fuite des cerveaux, « Diasporactive » valorise une migration des cerveaux à l’envers. Celle qui rime avec le retour d’une vie… pensé, conçu, imaginé par une cohorte de 6 personnes munis de 6 projets solides à concrétiser pour la Tunisie.


Un programme d’accompagnement


« Diasporactive » est un programme élaboré par l’incubateur « 1kub » et a pour objectif d’encourager de jeunes entrepreneurs tunisiens, vivant à l’étranger, d’investir dans leur pays. Une initiative qui offre accompagnement, sessions de formation, services et consultations effectuées par des experts. «Diasporative» est l’émergence d’un espace d’échanges d’expériences, d’outils, de savoir et se présente comme une aubaine pour réseauter dans un cadre propice à la créativité et à la conception. Le programme engage les participants dans une expérience fructueuse, qui donne des réponses, en théorie, aux inquiétudes liées à l’investissement en Tunisie, à l’aspect administratif tunisien, à la bureaucratie, à la loi tunisienne, et au contexte national, qui reste méconnu pour des jeunes ayant passé des années de leur vie, loin du pays. Le programme « Diasporactive » a débuté en septembre avec la sélection de 9 entrepreneurs tunisiens essentiellement basés en France, Belgique, Italie, Autriche, Allemagne … mais aussi aux USA. La moitié sont des femmes, pour la plupart de formation ingénieur ou issues du secteur informatique. Les candidats ont, à leur actif, au minimum 12 années à l’étranger, et envisagent de percer professionnellement avec un projet qui leur permet d’être fonctionnels, pourquoi pas, entre deux rives. Cette envie devient persistante, malgré leur position professionnelle avantagée à l’étranger.


Une succession de projets ambitieux


Un éventail de projet viables est présenté lors d’une session de formation organisée par « 1Kub ». Les secteurs concernés sont le tourisme durable, l’amélioration des services du quotidien chez les Tunisiens, l’exportation de produits d’artisanat ou du terroir tunisien, et d’autres, à caractère technologique impactant comme le lancement d’applications, de plateformes ou de CRM. L’accompagnement dans une première étape a duré 3 mois pour les participants désireux d’élaborer leurs projets. La progression pour chacune et chacun varie : il y en a qui pensent encore leur vision, et d’autres qui sont déjà dans la concrétisation. Sarah Bourouissi pense un projet écolo, pour un tourisme durable et sain pour l’environnement à développer auprès de restaurants et d’hôtels en Tunisie. Une idée qui nécessite actuellement son étude du marché. L’aspect «développement» de son projet prometteur évolue bien. Adel Lusakula est tuniso-congolais, ingénieur à Toulouse. Depuis son plus jeune âge, il rêve d’entreprendre. Son souhait prend forme dans son projet destiné à la fabrication du miel organique : une vente export qu’il trouve nécessaire à la valorisation du miel de Tunisie. Safouane ben Haj Ali tient à concevoir une plateforme numérique au nom insolite « My Chakchouka » qui connecte les artisans tunisiens au marché global. Sa cible, ce sont les personnes qui s’intéressent aux produits tunisiens.


Aya Omrani, au parcours universitaire atypique, veut fonder « Med Journey », une agence de tourisme médical en Tunisie. Une aubaine qui pourrait rallier soins et tourismes. Ala Selmi savoure son expérience naissante dans le e-commerce avec son associé tunisien basé aux USA. Son projet vise à lier les commerçants à leurs clients à travers « Souk express ». Son e-ccommerce a pour but de faciliter les courses de tous les jours chez les citoyens tunisiens. Taoufik vit à Paris depuis 35 ans. Il tient à récupérer un bien familial : une ferme coloniale, qu’il tient à convertir en chambres ou maison d’hôtes. Il a une collection importante d’objets historiques qu’il peut exposer ou en faire un musée. Un lieu de villégiature est actuellement en devenir à Zaghouan, dans ce domaine de Bir Mchergua.


Cette première cohorte de ce programme est financée par l’Union européenne et soutenue par «Thamm Ofii» qui cible les membres de la diaspora et leur capacité d’offrir des opportunités économiques, sociales et culturelles attrayantes. Le programme est aussi déployé sur d’autres gouvernorats : le Cap Bon et Zaghouan, Béja et Sfax. D’autres projets vont voir le jour. «1Kub», l’incubateur, lance régulièrement des appels pour le programme «diasporactive», pour accompagner d’autres entrepreneurs de la diaspora, dans la structuration et la mise en œuvre de leurs projets, dans la définition du Business Modèle, la construction du Business Plan, l’étude de marché mais aussi la connexion avec les structures facilitatrices, peut -on lire dans un communiqué.

Programme «Diasporactive» : Retour au bercail
« Salha Nasraoui » : « La source », une histoire racontée autrement
ENTRETIENS1 / 11 / 2025

« Salha Nasraoui » : « La source », une histoire racontée autrement

En enchaînant les rôles remarquables de mères battantes et fortes, Salha Nasraoui effectue son grand retour en 2024 pour son public connaisseur. Elle a été aussi une grande découverte pour d’innombrables spectateurs férus de théâtre et de cinéma, mais qui ne la connaissaient pas. A l’affiche de « La source » de Meryem Joober, en salles à partir du 15 janvier, elle sublime l’écran au cinéma et conquiert par son interprétation, y compris au théâtre. Rencontre.


Vous êtes à l’affiche de « Mé Al Ain » ou « La source » de Meryem Joober qui sort le 15 janvier dans toutes les salles de cinéma. Précédemment, en 2019, beaucoup vous ont remarquée dans « Brotherhood », signé par la même réalisatrice et nominé aux oscars. Vous y campez le rôle d’une mère meurtrie mais résiliente face à la destinée de son enfant. Selon vous, comment s’est passée cette transition du film court à sa version longue ?


Les deux films paraissent similaires parce qu’il s’agit de la même famille, qu’il y a aussi le retour du jeune garçon de Syrie. Dans « Brotherhood » — le court — l’histoire était plutôt vue par le mari. La réalisatrice a eu l’idée de faire du film un long métrage, mais raconté du point de vue de la mère. Comment elle vit le déchirement, la séparation d’avec ses enfants, la tourmente ou la déroute. A partir de cette idée, tout le personnage a été développé pour raconter l’histoire autrement. « La source » raconte une histoire autrement, d’un autre point de vue.


Vous jouez le rôle de la figure maternelle, par excellence. Comment s’est passée votre incarnation de ce personnage assez complexe ?


Ce n’était pas facile, comme tout personnage composé. Façonner et s’imprégner d’un rôle comme celui-ci n’est pas facile. Je ne banalise rien. Je ne prends rien à la légère. Il faut de la persévérance, de l’ardeur. Il s’agit d’un travail ficelé. C’est le théâtre qui nous apprend à être minutieux, à bien s’imprégner d’un personnage, bien le connaître, tisser sa vie, tout savoir sur sa personnalité, ses qualités, ses défauts. On a beaucoup écrit, et on a formé les autres acteurs plus jeunes du film. « Aïcha », je l’ai beaucoup adopté et j’ai su comment lui donner vie. Faire de sa résilience, sa force, sa tranquillité un point fort. La direction d’acteurs de Meryem Joober était excellente : on connaissait ce qu’on voulait, nous, acteurs. Sa direction est si douce. Elle nous a fait comprendre qu’on peut arriver à bout d’un très bon travail, sans être dur, forcément sur un plateau de tournage. Elle est d’une bienveillance exemplaire.


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Comment s’est passé le travail avec les jeunes acteurs du film et avec Mohamed Grayaâ? Il y a beaucoup d’esthétique dans le film, notamment celle du lieu. Très naturel. Que gardez-vous en souvenir du tournage ?


On a effectué des ateliers classiques et indispensables d’acting : avec exercices de base, de respiration, de mouvement, d’allures. Ce sont des cours de théâtre qu’il a fallu pour eux en premier, pour bien les initier. La réalisatrice a suivi le processus dès le départ et ils ont vite appris. Avec Grayaa, nous formons un très bon tandem à l’écran. J’ai beaucoup aimé travailler avec lui. Pendant 6 semaines, j’ai été coupé du monde en fermant mon téléphone. (Rire) Le paysage était splendide, avec des plaines arides, naturelles et il ventait beaucoup. C’était un tournage sans doute très physique avec ses petites difficultés mais surmontables et qui reste très plaisant. Ça a duré 6 semaines et c’était magnifique.


« Le Bout de la mer », dernière pièce de théâtre en date de Fadhel Jaibi, vous a fait connaître dans le rôle extrêmement complexe et dur d’Atika, une autre mère à la destinée tragique. Une œuvre dure mais remarquable qui me pousse à vous interroger sur le lien que vous avez à la scène. Quelle est la différence pour un acteur de jouer dans le cinéma et d’être sur scène ?


J’ai fait du théâtre, ensuite, du cinéma, et je suis revenu au théâtre. Ce sont les outils et la formation qu’on a qui comptent le plus. Notre prestation, nos corps, notre présence scénique, visage, gestuel. Notre mental, la voix. Ce sont des outils qui doivent tout le temps être entretenus. C’est ce qui nous forge en tant que comédiens. Ce qui nous forme. Tout cela à la fois doit être dosé sur scène ou à l’écran, et c’est au metteur en scène ou au réalisateur de le faire. Il ne s’agit pas de disciplines différentes. Un acteur reste un acteur avec une bonne direction, un bon encadrement. Nous avons « un témoin » en tête, en tant qu’acteur qui nous permet de sentir quel résultat avoir dans une création. L’acteur s’adapte à un film comme dans une pièce théâtrale avec peut-être un peu plus d’effort physique fourni sur scène, et avec plus de sentiments, d’émotions exprimées.


Après « Jounoun », pièce de Fadhel Jaibi, mise en scène en 2000, vous avez retravaillé avec lui en 2023 sur « Le bout de la mer ». Que gardez-vous en tête des deux expériences ?


Dans « Jounoun », j’ai été étudiante. Je faisais encore du théâtre et j’ai été flattée qu’il m’ait choisie. J’étais jeune, honnêtement. On a fait le tour du monde avec. Elle a été jouée 150 fois partout. J’étais poussée par ma passion et mon envie effrénée de travailler, sans arrêt, sans parvenir sur le moment à cerner exactement ce que j’ai acquis comme savoir. Ce n’est qu’en enchaînant les expériences après « Jounoun » qu’une prise de conscience s’est déclenchée et que j’ai su à quel point j’ai tellement appris de Jaïbi. Renouer avec lui récemment m’a fait comprendre qu’il était bien plus important que je ne l’imaginais.


Dans les trois rôles que vous présentez actuellement, vous jouez le personnage de la mère-totem. Comment s’est faite cette succession de choix de rôles ?


Franchement, ça s’est fait par hasard. Ce sont des figures maternelles très différentes que j’ai eu plaisir à jouer. C’est une question de timing et j’ai fait avec pour « La source », comme pour « Les enfants rouges » de Lotfi Achour (Qui sort prochainement) ou pour « Le bout de la mer » de Jaibi.



« Salha Nasraoui » : « La source », une histoire racontée autrement
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